« A décor souvenirs impérissables, son décor royal encore debout, avec son château, ses terrasses, ses marbres et ses fontaines, Versailles n’est qu’une harmonie. Tout y présente l’unité d’une œuvre d’art accomplie; la construction, l’ornementation, le détail le plus modeste et l’ensemble le plus majestueux, tout obéit à la même pensée, la réalise, l’exalte et l’impose.
L’enchantement d’un passé, que cette forte conception révèle, saisit l’imagination dès que les grilles des jardins sont franchies. Afin que l’impression soit complète et ineffaçable, on devrait choisir, pour cette visite, un jour de solitude, au moment du printemps, alors que les parterres de Le Nôtre se rajeunissent par la profusion des fleurs nouvelles, ou plutôt vers la fin de l’automne, quand, dans les allées désertes, les pas soulèvent avec les feuilles mortes une jonchée de souvenirs.
Au déclin de la saison, la maison de nos rois, alors abandonnée des foules, reprend sa signification souveraine, et les coulées d’or et de cuivre qui chamarrent les hauts feuillages s’accordent à rappeler les splendeurs d’autrefois. L’âme la moins ornée, la pensée la moins vive est émue par la puissance d’un tel décor de tristesse et de beauté. Car ce n’est point en vain que ce parc de novembre, en sa somptuosité désolée, célèbre chaque année une commémoration magnifique de la royauté.
L’illusion devient maîtresse en ce lieu de fastueuse mélancolie on y sent revivre ceux qui l’animèrent, personnages de gloire, de noblesse, d’intrigue et d’amour et c’est là’ surtout qu’on arrive à saisir l’esprit de la monarchie française, dont ils furent l’orgueil, la parure ou le soutien.«
Les jardins de Versailles – Pierre de Nohlac
> EN SAVOIR + SUR LE VERSAILLES ROMANTIQUE